Décryptage : Comment a évolué le nombre de joueurs de poker depuis la libéralisation du marché ? Quelles ont été les fluctuations au cours des dernières années ? Quels sont les événements qui ont influencé le nombre de joueurs sur les différentes plateformes ?
Par Thibault R , publié le jeudi 18 juillet 2024 à 20h00
Avant d’aller plus loin, qu’est ce qu’un CJA ou encore compte de joueur actif ? Sont considérés comme des Comptes Joueurs Actifs (CJA), c’est-à-dire ceux dont les joueurs ont engagé au moins une action de jeu sur la période.
I. 2010-2012 : Phase de croissance
La période de 2010 à 2012 a marqué une phase d’euphorie, ou l’offre de poker est devenue extrêment médiatique, les opérations marketing de la part des opérateurs a fortement contribué à une hausse du nombre de joueurs sur les plateformes de poker. En 2010, le nombre de joueurs était de 1,188 million, en 2011 de 1,686 million pour atteindre en 2012, un chiffre de 1,7 million. En 2011, bien que le nombre de joueurs augmente timidement, les montants des mises totales jouées au cash game baissent de plus de 1.4 millions d’euros qui ne sont pas compensés par la progression des tournois. Le ralentissement de l’activité de cash game (CG) a sans doute plusieurs causes. La première semble être l’insuffisant renouvellement de la base des joueurs.
Cette baisse d’activité en CG a directement impacté les opérateurs puisqu’entre 2010 et 2012, plusieurs opérateurs ont dû mettre la clé sous la porte. Fin 2010, 48 agréments avaient été délivrés auprès de 35 opérateurs. Fin 2012, c’est 33 agréments qui ont été délivrés auprès de 22 opérateurs. Sur les 33 agréments, 16 possèdent la licence pour exercer le poker en ligne. Cet engouement s’est heurté à la réalité du terrain, c’est ainsi que ILIAD Gaming ou encore Tranchant interactive Gaming ont du fermer.
2. 2013-2016 : phase de déclin
Le nombre de joueurs a chuté de plus de 500 000 entre 2012 et 2013, puis cette perte de joueurs s’est poursuivie jusqu’en 2016 pour atteindre 976 000 comptes actifs.
En 2016, le marché du poker connaît un léger recul. Il y a un effet ciseau entre le cash game et les tournois poursuit son oeuvre. La diminution de l’activité de cash game, observée depuis 2012, continue en 2016 mais dans des proportions beaucoup plus faibles (-5 % contre -14 % en 2015). En revanche, les droits d’entrée pour les tournois sont en hausse par rapport à 2015, bien que la croissance soit nettement moins rapide (+5 % contre +14 % en 2015).
Les raisons de ce déclin sous multiples : les opérateurs agréés ont diminué leurs dépenses marketing et leurs campagnes de communication. Ils ont souvent opté pour cibler des médias plus spécialisés et moins coûteux (Internet), au détriment des grands médias nationaux tels que la télévision, la presse généraliste, et l’affichage. La taxation trop importante sur les mises de cash game a favorisé ce phénomène, des offres illégales bien plus attractives pour les joueurs francophones qui s’échappent ainsi du radar de l’ARJEL. Enfin, l’activité de poker en ligne est affectée par les fluctuations économiques et la réduction des dépenses de loisirs des ménages, qui résultent des ajustements budgétaires nécessaires en période de crise économique.
3. 2017-2019 : Une croissance légérée
De 2016 à 2019, le nombre de joueurs actifs augmentera de 150 000 utilisateurs, soit une faible croissance sur ces 3 années.
Cette croissance se mêle a des ajustements législatifs majeurs en 2016 l’état autorise l’introduction des nouvelles variantes et le décloissement du marché avec les voisins européens. Les nouvelles variantes sont désormais disponibles sur les plateformes de jeux en ligne comme : le Omaha 5, le Omaha Hi-LO, le 2-7 triple Draw et le stud. Auparavant, elles étaient strictement interdites, il s’agit d’une aubaine pour les jamateurs de poker.
En 2019, le Produit Brut des Jeux du segment du poker atteint 272 millions d’euros, en hausse de 6 % par rapport à 2018, grâce à une augmentation de l’activité des tournois de poker. Le chiffre d’affaires des tournois progresse de 8 % sur l’année, atteignant 184 millions d’euros. En conséquence, les tournois représentent 68 % du chiffre d’affaires du poker en 2019, c’est lui draine et dynamise le marché.
4. 2020-2024 : une explosion puis une stabilisation
Le nombre de CJA a augmenté de 53% entre en 2019 et 2020, le covid a boosté l’activité pokeristique de façon historique soit 641 000 joueurs actifs supplémentaires (lien du rapport ici, page 43).
Poker en ligne a eu un effet aubaine avec les confinements. Le chiffre d’affaires du pour cette année s’envole à 446 millions d’euros (+64 % par rapport à 2019), ce qui constitue un nouveau record d’activité effaçant la précédente qui datait de 2011, première année complète du lancement de l’ouverture du marché. Les mesures de confinement (et plus particulièrement celles relatives au premier confinement) ont en effet entrainé un regain d’intérêt pour le poker. Le poker en ligne bénéficie du recrutement important de nouveaux joueurs en 2020 et sur lequel il compte capitaliser, par des actions de fidélisation, afin de maintenir un niveau élevé d’activité pour l’année à venir.
D’une part, les joueurs modifient leurs pratiques et préférences, en se tournant vers des jeux plus dynamiques et attractifs tels que le Sit&Go (comme les Expresso, Spin&Go, ou Twist, caractérisés par des formats Turbo et des dotations variables) ainsi que les MTT (notamment via le format Knock Out). D’autre part, les opérateurs intensifient leur offre de rendez-vous, de promotions commerciales et d’innovations sur ces types de jeux, en particulier sur les Sit&Go, ce qui accentue l’écart par rapport au Cash-game.